Je n’ai pas fait de grandes balades solitaires depuis mon retour de vacances. Justes des petites bricoles de trois ou quatre kilomètres grand maximum, et surtout au village. Le village, c’est bien. On y croise des voitures, des moissonneuses batteuses, des motos, des vélos, des tracteurs, des enfants et des ados, des petits vieux qui nous font coucou de la main, des petit chiens hargneux et des grands chiens qui font semblant d’être méchants, des caniveaux avec un peu de flotte même qu’on dirait des torrents, une aire de pique-nique avec un table qui fait peur et puis non finalement ça va… Alors oui, le village, c’est bien, c’est rassurant, même si des fois on a un peu la trouille. Mais il y a deux semaines, Ulsan et moi, nous nous sommes prises pour des zaventurières sans peur et sans reproche et nous sommes allées dans la vaste plaine. Mumule a eu la froussed’un tuyau qui se trouvait au loin (au très loin), elle m’a fait une jolie marche arrière suivie d’une escapade dans un champ de blé pas encore moissonné. J’ai essayé de la raisonner, je l’ai remise dans le droit chemin mais elle m’a refait la même démonstration. Qui a fini par un demi-tour dont elle a le secret (je pense qu’elle fait un magnifique pivot sur un postérieur, un truc digne d’une pirouette). Et la Reine des Gamelles a chu. Dignement, sobrement et sans se faire mal s’il vous plaît. La mule, à trois mètres de là, a relevé la tête l’air surpris avant de la replonger dans les blés. J’ai récupéré l’animal et nous avons dépassé l’obstacle (Ulsan, bien planquée derrière Môman, n’avait même plus peur).
Je flippais déjà un peu avant cet incident, depuis, je redoute de nouveau les balades en solo.
Pascal, pour m’aider à reprendre confiance, m’a proposé de m’accompagner avec les chiennes cet après’m. Je l’ai suivi avec la boule au ventre. Une fois en selle, j’ai affiché mon plus beau sourire… crispé. En longeant la pâture, nous avons eu le droit au spectacle donné par ce pauvre Ranzo abandonné, galopant et hennissant. Mumule s’est alors un peu agitée, mais elle s’est montrée bien plus gérable que moi. « Tu m’attends hein, tu t’éloignes pas. Elle est où Doly ? Tu traverses pas sans moi ! Ouh là là, caresse pas l’âne, ça va m’énerver la mule. » Ce à quoi, patiemment, Pascal répondait « Sois cool ». Il en a de bonnes celui-là ! Nous avons eu tout de même une vraie zone de turbulence quand nous avons longé une pâture remplie de vaches aussi affolées qu’Ulsan et moi. J’arrivais à maintenir ma monture, je la mettais face aux bovins pour qu’elle ne s’échappe pas au galop sur le bitume. Du coup, les belles Primholsteins s’enfuyaient comme des débiles et Ulsan paniquait encore plus. Nous toutes – mule, vaches et cavalière- commencions à perdre les pédales. J’ai mis pied à terre, Ulsan a voulu s’échapper mais j’ai réussi à la retenir. Je l’ai rassurée, nous avons fait quelques mètres à pied et je me suis remise en selle. Nous avons pris le chemin du bois des montagnes et je me suis mise à chanter. Ulsan avait les zoreilles en arrière, sans doute que Pascal aussi… Bref, nous avons fini la boucle sans incident et j’avais un peu envie de gerber. Super ! Dire qu’il y a un peu plus d’un mois, je galopais joyeusement sur les sentiers, comme une grande, sur ma mumule adorée. Va comprendre Charles, va comprendre.